30 ans d'AEWA - Déclaration de M. Jacques Trouvilliez, Secrétaire exécutif de l'Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie (2014-2025)

Suite au départ de Bert Lenten, l’intérim du poste de Secrétaire Exécutif fut assuré par Marco Barbieri, également conseiller scientifique à la Convention sur les especes migratrices (CMS). Marco Barbieri participa à la MOP6, La Rochelle, France, en 2012. En janvier 2014 fut lancé l’unité conjointe de communication, fruit de la collaboration entre la CMS et l’AEWA.

Je pris mes fonctions le 2 juin 2014. J’avais assisté à la naissance de l’AEWA en participant au dernier round de négociations à la Haye du 12 au 16 juin 1995 comme membre de la délégation française. C’est donc ému et fier que je prenais les rênes du Secrétariat, pleinement conscient des enjeux portés par ce traité international extrêmement bien pensé par Gerhard Boere. A mes yeux, le texte de l’AEWA adopté en 1995 est d’une modernité qui ne se dément pas au fil des ans.

Que dire de ces onze années passées à la tête du Secrétariat avant mon départ à la retraite à la fin de cette année ?

Je me suis attaché dès mon arrivée à consolider le budget et les postes du Secrétariat, en promouvant les personnels les moins bien reconnus et en augmentant les temps partiels de plusieurs membres. Car le travail et la complexité des tâches allaient croissants. Les mandats issus des résolutions adoptées par les Parties s’accumulaient sans que les ressources financières et humaines ne suivent la même cadence.

Permettez-moi de citer deux projets majeurs.

En 2016 fut lancé la Plateforme européenne de gestion des oies (EGMP), premier projet d’envergure pour promouvoir la gestion adaptative comme outil de gestion de populations d’oies qu’elles soient en forte croissance ou en déclin. Cette plateforme illustre l’esprit de l’AEWA : tous les décideurs sont invités à déterminer la meilleure trajectoire pour atteindre des objectifs de population adoptés par consensus. Cette plateforme est appelée à traiter d’autres espèces notamment de canards. Cette approche basée sur les meilleures connaissances scientifiques et sur de larges discussions avec toutes les parties prenantes a été reconnue par le Programme des Nations-Unies pour l’Environnement (PNUE/UNEP) qui a retenu en 2024 la plateforme parmi les 5 finalistes du prix KIPEPEO dans la catégorie innovation, ce dont nous sommes tous fiers.

En 2017, le projet RESSOURCE, acronyme pour « Renforcement d’Expertise au Sud du Sahara sur les Oiseaux et leur Utilisation Rationnelle en faveur des Communautés et de leur Environnement », été porté sur les fonts baptismaux par la FAO avec le soutien du Fond Français pour l’Environnement Mondial (FFEM) et de la Commission européenne. Je voudrais ici remercier le secrétaire général du FFEM qui a soutenu cette idée dès le départ. Une nouvelle phase s’est ouverte avec le projet RESSOURCE+ portant ainsi les crédits consacrés à la connaissance et l’utilisation durable des espèces d’oiseaux d’eau du Sahel à plus de 10 millions d’euros. Ce projet, outre l’amélioration des connaissances sur les populations d’oiseaux d’eau du Sahel, a permis de démontrer l’importance de cette ressource en protéines pour les populations locales vivant à proximité de ces grandes zones humides ainsi que des pistes pour l’amélioration de la gestion de ces milieux.

L’année 2021 fut aussi marquée par la décision de bannir le plomb dans toutes les zones humides des 27 pays membres de l’Union Européenne, sauvant ainsi environ 1 million d’oiseaux d’eau de l’empoisonnement. L’AEWA et notamment la présidente du Comité technique, Mme Ruth Cromie, a activement participé en tant qu’expert aux travaux ayant conduit à cette décision entrée en vigueur en 2023.

La journée mondiale des oiseaux migrateurs co-pilotée jusqu’alors par l’AEWA et la CMS a été rejointe par deux organisations majeures : l’Environnement pour les Amériques (EFTA) en 2017 et le Partenariat des voies de migrations de l’Asie de l’Est et de l’Australasie (EEAFP) en 2023. Désormais cette campagne couvre les principales voies de migration et constitue un outil majeur de sensibilisation.

Ces résultats ont été obtenus grâce au soutien des Etats Parties et de nombreuses organisations partenaires mais aussi grâce au dévouement des personnels du Secrétariat.  Que toutes et tous soient remerciés ici. La famille AEWA est exceptionnelle !

Il reste encore beaucoup à faire pour ces espèces mais le CSR8 a démontré que les populations d’oiseaux d’eau migrateurs se portaient un peu mieux que d’autres compartiments de la biodiversité. Les actions coordonnées lorsque mises en œuvre rapidement portent leur fruit. Pour le Courlis à bec grêle, non revu dans la nature depuis 1995, l’AEWA est arrivée trop tard.

L’AEWA compte désormais 85 Parties et je terminerai cette rétrospective en appelant les Etats de l’aire de répartition qui n’ont pas encore rejoint l’AEWA de le faire car participer aux travaux de l’AEWA c’est aussi être à la pointe de la conservation de la biodiversité, beaucoup d’outils pouvant s’appliquer à d’autres groupes d’espèces.

Dernière mise à jour le 17 Juin 2025

Type: 
News item
Species group: 
Birds