L’AEWA a vingt ans!

Concrétiser la conservation au niveau de la voie de migration – Vingt ans de conservation internationale des oiseaux d’eau en action.

Bonn, le 16 juin 2015 – Le 16 juin 2015 marque le 20e anniversaire de l’aboutissement des négociations intergouvernementales qui ont mené à l’adoption de l’AEWA – l’Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie, un traité international dédié à la conservation des espèces telles que grues, cigognes, canards et oiseaux de rivage qui voyagent régulièrement le long des voies de migration reliant continents et océans.

Le traité rassemble des pays et la vaste communauté internationale de la conservation dans le but de protéger et gérer 255 espèces d’oiseaux d’eau migrateurs et les habitats, tels que les zones humides, dont ces espèces dépendent. La région géographique couverte par l’AEWA inclut la totalité de l’Europe et de l’Afrique, de même que le Moyen-Orient, l’Asie centrale et l’archipel canadien, faisant de cet Accord l’instrument régional le plus grand de sa sorte, conclu dans le cadre de la Convention sur la conservation des espèces migratrices (CMS).

Bien des choses se sont passées depuis que l’idée d’un traité international couvrant les oiseaux d’eau du Paléarctique occidental a été avancée pour la première fois. La proposition concrète initiale est venue de l’UICN en 1983, avant que la CMS, nouvellement établie, n’assume la responsabilité du développement du concept. Lors de la première Conférence des Parties à la CMS, une résolution fut votée, appelant le Secrétariat à prendre des mesures pour développer des accords pour la Cigogne blanche et les Anatidés du Paléarctique occidental. À un stade précoce, ces deux accords ont fusionné, devenant tout d’abord ce qui devait être nommé l’Accord sur les oiseaux d’eau du Paléarctique occidental, puis finalement l’AEWA.

Lorsque les Parties à l’AEWA se réuniront pour la sixième fois en novembre de cette année à Bonn, elles pourront porter un regard rétrospectif sur vingt ans de résultats et de progrès. L’AEWA s’est imposé comme un instrument efficace et opérationnel, procurant de véritables bénéfices en termes de conservation sur le terrain à la fois pour les oiseaux migrateurs, leurs habitats et les hommes. Cette réputation enviable a sans nul doute été l’une des raisons principales pour lesquelles l’Accord n’a cessé de se développer, persuadant 75 des 120 États de l'aire de répartition – 35 d’Afrique et 40 d’Eurasie – d’y participer.

Bert Lenten, AEWA's first executive sectretary

« L’un des principaux résultats de l’AEWA est qu’actuellement, l’approche de la conservation par la voie de migration est bien acceptée et utilisée dans la pratique, ce qui n’était certainement pas le cas quand j’ai commencé à travailler pour l’Accord en 1996.  »
Bert Lenten, le premier Secrétaire exécutif de l'AEWA

« L’UE elle-même continuait à rédiger des plans d’action qui ne couvraient que le territoire européen, bien que de nombreuses espèces passent l’hiver en Afrique. L’AEWA fut le premier Accord sous la CMS à englober plusieurs continents. Grâce à sa mise en œuvre réussie au fil des ans, l’AEWA a attiré 75 Parties, et, avec le recul, vous verrez que cette croissance a également entraîné une augmentation des Parties à la CMS dans la région d’Afrique-Eurasie, » a déclaré Bert Lenten, le premier Secrétaire exécutif de l’AEWA, qui est à présent Secrétaire exécutif adjoint de la Convention mère.

La nature transfrontalière des espèces migratrices signifie que leur conservation ne peut être assurée que si tous les pays où elles se reproduisent ou hivernent, ou qu’elles traversent, conviennent d’objectifs communs et coopèrent pour les atteindre. L’AEWA porte sur un groupe d’espèces qui dépendent d’habitats similaires le long de l’une des principales voies de migration reconnues, couvrant l’Afrique et l’Eurasie. Cette orientation spécifique permet à l’AEWA de se concentrer sur le développement de réponses politiques appropriées aux défis auxquels sont confrontées bon nombre des espèces couvertes par le traité. Ceux qui ont rédigé l’Accord ont été conscients que pour être efficace, l’AEWA avait besoin d’être correctement représenté en Afrique comme en Eurasie, et en conséquence, les dispositions ont inclus que la ratification de l’Accord par sept pays de chacune des deux sous-régions était requise pour son entrée en vigueur.

Jacques Trouvilliez, Secrétaire exécutif de l’AEWA depuis juin 2014 et membre de la délégation française lors des négociations en 1995, commente : « Au début, l’objectif de l’AEWA était de faire face aux cas d’urgence – et l’Accord a donc élaboré des plans d’action par espèce pour les espèces les plus menacées figurant dans les Annexes, afin de s’attaquer à leur état de conservation défavorable. » Des progrès satisfaisants ayant été réalisés dans l’arrêt du déclin des cas les plus urgents, l’AEWA peut commencer à tourner également son attention vers l’utilisation durable. L’un des moyens pour y parvenir est l’Initiative africaine, un instrument qui cherche à maximiser la participation des communautés locales, s’appuyant sur les progrès réalisés dans le cadre du projet de voie de migration Wings over Wetlands (WOW) pour l’Afrique-Eurasie, développé sous le PNUE-FEM – qui est à ce jour le projet le plus ambitieux à l’échelle de la voie de migration dans la région de l’AEWA. Financé par le Fonds pour l’environnement mondial (FEM), le projet WOW a aidé à renforcer le profil de l’AEWA en Afrique, en engageant du personnel ne faisant pas partie de l’effectif immédiat habituel de l’Accord parmi les experts de la conservation.  

Administré, comme la Convention mère, par le Programme des Nations Unies pour l’environnement, l’AEWA profite de liens institutionnels et politiques étroits avec la Convention sur la Diversité biologique, et contribue aux efforts déployés pour atteindre l’Objectif 12 d’Aichi visant à éviter d’ici à 2020 l’extinction des espèces menacées connues et à améliorer et à maintenir l’état de conservation des espèces, en particulier celles qui connaissent un fort déclin.  L’AEWA a également profité d’une relation fructueuse avec la Convention de Ramsar et diverses ONG de conservation.

Avec la reconnaissance par les gouvernements que la coopération internationale était le seul moyen d’atteindre les objectifs de conservation le long de la voie de migration d’Afrique-Eurasie, l’autre fondement de l’Accord était le dévouement d’un groupe de personnes clés, qui ont eu la perspicacité et la détermination de réconcilier les intérêts conflictuels des experts de la conservation, des chasseurs et des agriculteurs, pour créer un outil efficace de conservation et d’utilisation durables. Nous rendons hommage à certaines de ces personnes dans la série Les gens dans les coulisses, consacrée aujourd’hui à Gerard Boere, des Pays-Bas, qui plus que quiconque peut se déclarer légitimement le « père de l’AEWA ».

Jacques Trouvilliez, AEWA's Executive Secretary

« En se tournant vers l’avenir immédiat, deux activités domineront notre ordre du jour au cours des prochaines années – développer plus avant l’Initiative africaine et œuvrer en direction d’une utilisation durable et d’une gestion adaptative – afin de parvenir à un équilibre entre la conservation et les activités humaines, et d’assurer la réalisation des objectifs de conservation au sens large ».
Jacques Trouvilliez, l'actuel Secrétaire exécutif de l'AEWA

Ceci peut signifier l’adoption d’une action basée sur les meilleures pratiques et un modelage scientifique solide pour assurer qu’un bon nombre des espèces de l’AEWA, telles que l’Oie à bec court de Svalbard, soit limité afin de réduire les conflits avec les agriculteurs et les plus vastes intérêts de conservation ; les oies paissent excessivement la toundra, ce qui a un impact négatif sur d’autres espèces en danger qui partagent cet habitat. « Laisser la nature à elle-même n’est pas une option, si nous devons assurer la survie des espèces en danger », a ajouté Jacques Trouvilliez.  « La gestion adaptative est une arme à double tranchant – pour les espèces en déclin, nous devrons peut-être fixer des limites en termes d’effectifs et de périodes de chasse, mais nous ne devons pas avoir peur d’agir de façon décisive lorsque la conservation au sens large ou les intérêts humains l’exigent ».

L’une des tâches qui nous restent est de persuader le plus possible d'États de l'aire de répartition qui ne sont pas encore Partie contractante de ratifier l’Accord. Une autre ambition qui devrait souligner le succès de l’Accord serait de pouvoir commencer à faire baisser le degré de menace pesant sur les populations de quelques-unes des 255 espèces couvertes par l’Accord, car ceci indiquerait que l’un des objectifs fondamentaux a été atteint, à savoir assurer un état de conservation favorable aux oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie.

Dernière mise à jour le 29 October 2015

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News item